How dogs see us: the perception of human faces by dogs : Huber, Ludwig ; Racca, Anais ; Yoon, Yennifer ; Pitteri, Elisa ; Virányi, Zsófa ; Range, Friederike, Messerli Research Institut, University of Veterinary Medicine, Vienna, AUT; School of Life Sciences, Lincoln, UK; Department of Psychology, Standford University New York, USA; Department of Comparative, Biomedicine and Food Science, Legnaro, ITA; Wolf Science Center, Vienna, AUT
Une multitude d’études récentes ont mis en évidence les performances cognitives des chiens dans la lecture du comportement humain. Parmi ceux-ci, il a été constaté que les chiens domestiques s’occupent et utilisent certains indices faciaux et crâniens humains. Ils peuvent utiliser l’orientation de la tête ou la visibilité des yeux pour évaluer l’état d’attention d’une personne humaine et ils peuvent suivre la direction des yeux et de la tête pour trouver des aliments cachés. Cet exposé vise à faire un examen critique des processus perceptuels-cognitifs qui sous-tendent la capacité du chien à utiliser le visage humain comme ressource pour interagir et communiquer avec les humains, en particulier leurs partenaires humains.
Les visages humains diffèrent de manière subtile et possèdent de nombreuses caractéristiques idiosyncrasiques, ce qui constitue une riche source d’indices perceptifs. La capacité des chiens à utiliser ces indices hétérospécifiques peut avoir des influences phylogénétiques et ontogénétiques. En tant qu’espèce, ils ont été intensivement exposés aux humains par le biais du processus de domestication et, en tant qu’individus, la plupart d’entre eux vivent à proximité des humains dès leur plus jeune âge. Une exposition aussi intense aux humains peut avoir conduit les chiens à développer certaines adaptations perceptuelles et cognitives qui peuvent les aider à interagir avec leurs partenaires humains. Ces dernières années, plusieurs études – menées par des collègues ainsi que par notre propre laboratoire – ont examiné la façon dont les chiens perçoivent les visages humains, ce qui guide leur attention, les informations qu’ils extraient et les décisions qu’ils prennent au premier contact.
Par exemple, une application de la méthode du regard préférentiel a révélé que les chiens peuvent différencier les visages humains familiers et inconnus présentés en vue frontale (Racca et al. 2010). En outre, les chiens peuvent également différencier deux visages familiers (le propriétaire et un ami du propriétaire), ce qui nécessite de porter attention à des indices plus subtils. En manipulant le contenu des visages présentés, nous pourrions en outre montrer que les chiens peuvent le faire en utilisant uniquement les traits internes du visage (yeux, nez, bouche et leur configuration). Nous avons également examiné la capacité du chien à discriminer les visages de deux personnes familières par choix actif. Bien que les performances des chiens aient diminué de manière significative lorsqu’on leur a présenté des images de têtes humaines après avoir appris à distinguer les vraies têtes, et lorsque – après avoir réappris – ils ont été confrontés aux mêmes images montrant uniquement les parties intérieures des têtes, deux chiens ont obtenu de très bons résultats dans toutes les tâches (Huber et al. 2013).
Cela corrobore les conclusions de Nagazawa et ses collègues (2011), qui ont montré que les chiens peuvent différencier les visages souriants des humains des expressions neutres (humains familiers ou non), les obligeant ainsi à utiliser les traits internes du visage pour le faire. Néanmoins, comme les humains, les chiens semblent effectuer un traitement holistique du visage avec des informations configurables plutôt qu’élémentaires. Les chiens se généralisent facilement aux nouvelles versions des visages connus si des informations configurables sont présentes (niveaux de gris, visages flous), mais ont des problèmes avec les faces inversées et brouillées. La similitude avec le traitement des visages humains est encore plus frappante dans le cas de caractéristiques spécifiques du visage. Des données récentes de notre laboratoire suggèrent que les chiens partagent avec les bébés humains un schéma de préférences visuelles pour des caractéristiques compatibles avec l’œil humain (polarité de contraste local) qui peuvent représenter un outil perceptif fondamental pour la vie dans la société humaine. En conclusion, nous évaluerons de manière critique les résultats des différentes études et les discuterons à la lumière d’un large cadre comparatif nécessaire pour clarifier les origines évolutives et développementales de ces aptitudes chez le chien.
L’origine du chien par Ray Coppinger
NOTES SUR LA CONFÉRENCE DE RAY COPPINGER (2005)
École Vétérinaire Maisons-Alfort
(à partir de la traduction simultanée) Rapporteur : Françoise Martin, Catherine Aye
Le professeur COPPINGER est l’un des spécialistes mondiaux de l’écologie comportementale des chiens. L’écologie comportementale, nouvelle appellation de l’éthologie, étudie, dans une espèce animale donnée, les différences entre les individus (diversité intraspécifique).
Biologiste, éleveur, formateur, et musher champion de course de chiens de traîneau, Raymond Coppinger cumule plus de quatre décennies d’expérience avec littéralement des milliers de chiens, offrant une perspective scientifiquement éclairée sur les canines et leurs relations avec les êtres humains.
Son programme de recherche couvre des domaines aussi divers que la reconnaissance individuelle, l’orientation dans l’espace, la communication au sein du groupe et, d’une manière plus générale, les processus évolutifs ayant déterminé le comportement et la vie cognitive du chien.
Le Professeur Ray COPPINGER a passé sa vie professionnelle et privée à étudier le comportement des chiens, depuis leurs origines jusqu’à leurs relations avec les hommes. Il a parcouru le globe en étudiant aussi bien les meutes de chiens sauvages de l’île de Pemba que les chiens de traîneaux de l’Arctique. Il est reconnu comme le père de la nouvelle théorie de l’évolution des loups aux chiens. Ses travaux concernent également les effets de la domestication sur la morphologie, la physiologie et le comportement des chiens. Il a en outre étudié les chiens gardiens de troupeaux et les chiens de berger.
Sa femme, Lorna Coppinger est l’auteur de The World of Sled Dogs: From Siberia to Sport Racing
Et tout deux ont écris: Dogs: A New Understanding of Canine Origin, Behavior and Evolution
1. Origine du chien :
La plupart des écrits concernant l’origine du chien nous ramènent aux loups. Mais ce ne sont que des hypothèses, aucune donnée scientifique ne l’a prouvé véritablement. Pour beaucoup, le chien serait même un loup domestiqué.
Le professeur Ray Coppinger présente une autre hypothèse, le chien serait une espèce voisine ayant vu le jour suite aux différents croisements entre les loups, les coyotes, les chacals et le loup rouge. Le chien serait donc issu d’une hybridation. Pour lui, d’ailleurs peut importe l’origine exacte du chien le principe n’étant pas de savoir si le chien descend du loup mais de comprendre que le chien est issu d’un réseau phylogénétique avec donc un échange de gênes multiples et ce, sur plusieurs milliers d’années. Il constate: « personne n’a jamais réussi au cirque à présenter de numéro avec un loup dressé ». On doit donc se demander ce que pouvait bien avoir de si particulier, voilà environ 15 000 ans, le loup d’Asie Orientale, pour » accoucher » du chien, compagnon sans lequel l’histoire de l’homme aurait certainement été bien différente ».Ce qu’il a pu constater au fil de ses recherches, ce sont les différences importantes qui existent entre le loup et le chien.
Le loup n’aboie pas, la différence précise avec l’aboiement du chien, c’est la fréquence du signal vocal d’alerte. Le loup émet un signal et s’en va, le chien aboie plusieurs fois pour faire partir. Les deux signaux font partie du modèle moteur d’évitement du risque (voir le paragraphe sur la génétique du comportement).
Le loup a une taille de tête beaucoup plus grande que le chien à poids égal. Si le chien descendait du loup, selon les lois de l’évolution élaborées par Darwin qui montrent que la vie va du moins complexe au plus complexe, il serait bien plus complexe avec un cerveau plus grand.
Le loup a des molaires beaucoup plus grosses que le chien à poids égal.
le loup a une peau moins épaisse que le chien, (les esquimaux se sont aperçus que leur pantalon en peau de loup tiennent environ une saison, ceux en peau de chiens environ 6 ans!!).
Le loup se reproduit en fonction des saisons, de l’été jusqu’en automne les loups mâles sont en période de repos, ils présentent alors une diminution de la grosseur des testicules, ils sont incapables de saillir même si on leur présentait une louve ou une chienne en chaleur.
Le loup présente une période de socialisation possible jusqu’à 19 jours après la naissance. Les dresseurs qui utilisent des loups enlèvent d’ailleurs les louveteaux à la mère pour pouvoir les imprégner sur eux en alimentant le bébé au biberon. Au delà de ces 19 jours, le loup ne deviendra jamais éducable. (chien 16 semaines).
Le loup est beaucoup moins rapide que le chien sur une longue distance
La louve doit avoir atteint un certain poids corporel pour pouvoir tomber en chaleur et avoir la capacité de reproduire.
Le loup ne mange pas en présence de l’être humain, (si vous jetez de la nourriture, il prend et s’en va plus loin, voir se cacher pour pouvoir la manger). Les chiens de village ou les groupes sociaux de chiens mangent dans les décharges à proximité des l’être humain sans aucun problème.
Le loup a un comportement social de meute, le chien vit en groupe social. Les premiers ont un comportement de meute afin de coopérer durant la chasse pour tuer des grandes proies. Après la chasse, ils retournent à leur repaire afin de régurgiter la nourriture pour une seule portée de bébés. Habituellement, il n’est pas possible qu’un loup seul (ou deux loups) puisse tuer des grandes proies ou élever seul une portée de bébés. Ainsi, la meute, souvent composée de membres d’une même famille, travaille ensemble dans l’optique d’une stratégie de survie. Pour les chiens, les autres chiens ne sont d’aucune aide lorsqu’il s’agit de se nourrir ou de nourrir les bébés.
Le loup mâle est capable de régurgiter pour nourrir les petits, les chiens mâles ne s’occupent pas des chiots.
Mais pour R.Coppinger, la différence la plus importante serait chez le loup l’apparition de comportements spécifiques à l’espèce (comportements émergents) pendant la période juvénile, qui est en fait le moment de transition entre l’évolution du jeune vers l’adulte (entre 4 et 12 mois), ils commencent à mettre en place le modèle moteur de recherche de nourriture, en même temps que les comportements de meute. Ces comportements émergents n’existent pas ou très peu chez le chien du fait qu’il n’y a pas chez ce dernier le modèle moteur de recherche de nourriture, il n’existe plus ou très peu du fait que l’être humain lui donne à manger, la mère n’ayant plus besoin de chasser, ni de régurgiter il n’y a donc plus l’apprentissage des codes de vie en meute.
2. Domestication :
Beaucoup de chercheurs et de scientifique pensent que l’homme serait allé chercher ou rencontrer des loups moins craintifs pour pouvoir les domestiquer, les apprivoiser, les élever et les faire devenir à long terme les chiens que l’on connaît. Pour lui il est impossible qu’il y ait eu adoption du loup par l’homme, par contre il pense qu’il y a eut adoption de l’homme par le loup-chien.
En effet le professeur Coppinger pense que cette adoption s’est passée lorsque les hommes du Mésolothique ont imaginés de vivre en village. Ils construisent des maisons permanentes et deviennent sédentaires.
Avec la sédentarisation, les déchets, les décharges sont apparues, et des loup-chien attirés par de la nourriture facile se sont installés dans cet environnement. Plus besoin chercher la nourriture, plus besoin de chasser, le garde manger était là en permanence sans effort.
Ils sont devenus alors ce que Mr Coppinger appelle des chiens de village. Le chien de village n’est pas un animal de meute au même sens que l’est un loup. Bien que les chiens aient chacun leur territoire et habitent un espace solitaire ils ne sont pas asociaux. Ils se sont adaptés pour se nourrir dans les villages (petites dents, petite tête et petit cerveau) et le comportement qu’ils ont pour se nourrir est spécifique à leur environnement). Cela signifie qu’ils attendent seuls la nourriture, et non pas de façon coopérative. Et ils sont « conscients » que les humains sont la source de leur nourriture. Ainsi, ils se focalisent sur l’activité humaine, plutôt que d’éviter l’activité humaine.
Certains chiens moins craintifs vont s’approcher de plus en plus près des hommes et vont cohabiter avec lui en les accompagnant dans certaines activités par exemple en suivant le berger qui part garder son troupeau. Quelquefois les enfants vont rencontrer de très jeunes chiots et rentrer en communication avec, en jouant et en s’amusant.
R. Coppinger a rencontré un jeune garçon Masaï dans un des villages d’Afrique du sud qui partait pour faire paître un troupeau. Un chien le suivait.
R. Coppinger lui demande « c’est ton chien »
le garçon dit » non c’est un chien du village »
Coppinger : « il a un nom ? »
Le garçon : « non pour quoi faire ? »
Coppinger « tu lui donnes à manger ? »
Le garçon se met à sourire voire à rire et regarde Coppinger comme s’il venait d’une autre planète et lui dit « donner à manger à un chien ? Mais le chien se nourrit tout seul »
Coppinger « mais que fait-il avec toi ? »
Le garçon » il m’accompagne depuis qu’il est tout petit »
Coppinger lui demande pourquoi et le garçon lui répond « je n’en sais rien ».
R.Coppinger a voyagé dans le monde entier pour rencontrer les chiens. Pour lui, il est très rare de rencontrer des chiens sans la présence de l’homme, il existe donc une symbiose entre le chien et l’homme, et le chien a une relation obligatoire avec l’être humain. Pour lui, si les chiens disparaissaient, l’homme n’aurait pas de problème, par contre l’inverse ne serait certainement pas vrai pour le chien.
3. Evolution, sélection, génétique du comportement et caractéristiques de race
Evolution:
Pour R. Coppinger, nous n’avons pas de données vraiment fiables sur la présence de la cohabitation du chien et de l’homme, peut-être sept à huit mille ans avant JC, ou bien quatorze mille ans avant JC mais cela n’a pas beaucoup d’importance pour lui.
L’évolution se serait faite par sauts et non pas graduellement, et un des effets fondateurs de cette évolution serait la maladie. La plupart des populations animales sont à un certain moment de leur existence ravagée par des épidémies diverses. Quelques individus survivent pour diverses raisons, plus résistants, organismes en meilleur état, etc. De ces survivants va naître une nouvelle population possédant des gènes de l’ancienne population et en plus de leurs gènes de nouvelles caractéristiques particulières qui leur permettent de s’adapter au nouvel environnement, et ainsi de suite et cela partout dans le monde. C’est l’adaptation à l’environnement qui permet l’évolution.
Sélection:
Pour R.Coppinger, il existerait trois types de sélection intervenant dans la domestication, qu’il illustre de cette façon :
*la sélection naturelle : un individu plus sociable, moins craintif a adopté l’être humain, il mène sa vie à côté de lui et se reproduit dans l’environnement où il vit. Par exemple ce sont les chiens de village qui vivent à proximité des décharges.
*la sélection artificielle : d’un de ces individus plus sociables naît un petit que l’être humain récupère, sans vraiment le choisir dans la portée, qu’il socialise et forme à une activité particulière.
*la sélection génétique : pour obtenir un animal apprivoisé, l’être humain a pris des animaux sauvages, les a placés en captivité. Par ex les renards du généticien russe Dimitri Belyaev. Belyaev a fait reproduire des renards en captivité, quelques génération après, il a vu apparaître des renards avec des oreilles tombantes, des couleur de robe différentes et un début d’aboiement qui sont des caractéristiques de chiens. Il a pu également mettre en avant que ceux qui avaient une robe avec plusieurs couleurs seraient moins craintifs. Leur docilité serait due à un taux d’adrénaline plus bas, il y aurait donc corrélation en couleur de robe et glande surrénale (à prendre avec réserve).
Dans cette sélection génétique, deux types de sélections existent :
*la sélection postzygotique : c’est à dire que qu’un groupe de chiens possède 1 ou 2 caractéristiques particulières. En se reproduisant entre eux, ils font ressortir ces caractéristiques qui conviennent à l’homme. Celui-ci va chercher à les conserver.
*la sélection prézygotique : l’être humain aimant ces caractéristiques ne fait reproduire que certains animaux en espérant garder ces caractéristiques spécifiques. Cette sélection est donc le fruit de l’hybridation, au sens de croisement, et non pas le fruit d’une sélection naturelle. Il y a eu intervention de l’homme dans le choix des reproducteurs.
Génétique du comportement, caractéristiques et naissance des races:
La réflexion de R.Coppinger l’amène à dire qu’il n’y a pas un éthogramme de chien mais plusieurs éthogrammes. Cette hypothèse totalement nouvelle bouleverse les certitudes actuelles, puisque pour beaucoup de scientifiques un chien est un chien quelque soit la race.
L’éthogramme est l’ensemble des modèles moteurs relatifs à l’animal. On entend par modèle moteur une suite de séquences de comportements spécifiques qui s’intègrent dans le développement de l’animal, et qui s’inscrivent comme des règles. Ces modèles moteurs sont des instincts réflexes, des sortes de programmes inscrits dans le cerveau. Ils ont donc une prédisposition génétique mais ne pourront s’exprimer que si l’environnement est propice.
Par ex : le border qui possède le modèle moteur : je fixe, je me mets à l’affût, je chasse, je saisis». Ces modèles moteurs sont des comportements programmés et l’animal ne se rend pas compte de ce qu’il fait. Si le Border vit dans la bergerie, avec les moutons, il ne peut pas développer son modèle moteur. Il doit être socialisé au troupeau mais ne peut y vivre, sinon il va s’attacher aux moutons et ne pourra pas mettre en place le programme à la base de la conduite de troupeau.
Il existe quatre grands modèles moteurs :
*la recherche de nourriture ;
*l’évitement du risque ;
*la reproduction ;
*le comportement parental.
Pour établir des éthogrammes par race, il faut mesurer les modèles moteurs, ces mesures sont faites sur :
*la forme : ensemble de règles qui correspondent à un environnement particulier ;
*la fréquence : de rare à très fréquent ;
*la séquence d’expression (chasse, attaque etc.).
L’agressivité pour R.Coppinger n’est pas un modèle moteur spécifique, c’est un comportement qui s’inscrit dans l’une ou l’autre des catégories. Ces comportements d’agression sont là soit pour protéger quelque chose, soit au niveau de la reproduction, soit au niveau de la nourriture, soit pour se protéger soi-même et dans ce cas précis, c’est donc l’évitement du risque.
Si nous prenons le loup, le modèle moteur de recherche de nourriture est différent suivant les âges. Les jeunes observent l’adulte qui ramène la proie, pousse la proie de la tête, monte sur la proie puis mendie aux adultes. Les adultes se mettent en place, se mettent à l’affût, courent, attaquent et tuent.
Si nous prenons le border nous avons l’apparition à l’âge de 10 semaines du modèle moteur « je fixe, je me mets à l’affût etc. » qui est comportement homologue à celui du coyote dans recherche de nourriture, mais le seuil d’arrêt est différent pour le coyote qui lui va jusqu’à tuer. Mais ce modèle moteur n’apparaît pas par exemple chez le berger d’Anatolie.
Concernant le modèle moteur de la reproduction il apparaît à 6 mois chez le border, vers 17 mois pour le berger d’Anatolie.
Chez un berger allemand, le modèle moteur de l’évitement du risque apparaît à l’âge de 5 semaines, alors que chez le labrador ce modèle n’apparaît qu’à 8 semaines.
Par ailleurs, en ce qui concerne le modèle moteur d’évitement du risque, le hurlement ou aboiement est une partie séquentielle de ce modèle moteur. Mais il varie suivant l’espèce et la race. Il faut étudier cet aboiement ou hurlement pour pouvoir connaître les différences et leurs significations. Pour mesurer le hurlement il faut avoir un appareil qui enregistre les données style oscilloscope. Puis on différencie plusieurs critères.
Tout d’abord on mesure la fréquence du hurlement au sein de laquelle on peut isoler deux modalités différentes : le ton grave et le ton aigu. Le ton est grave, constant, il est synonyme d’apaisement, d’amicalité, il va inciter le receveur de cet aboiement à réduire la distance qui le sépare de l’individu qui l’émet. Si le son est plus aigu, haché et rapide il est synonyme d’agressivité, le receveur va alors s’éloigner de l’émetteur.
Sont ensuite étudiés le rythme et l’amplitude (les décibels) de l’aboiement.
R.Coppinger met en évidence grâce à ces mesures les différences d’aboiement entre, par exemple, un beagle, un berger allemand et un chien de protection. L’aboiement est donc spécifique à la race.
Il a pris également connaissance d’un comportement de combinaison dans l’aboiement qui est une association de graves et d’aigus qui n’a pas beaucoup de signification. Par ex. le chien qui est attaché et qui va aboyer avec une modulation de graves et d’aigus, le receveur n’a pas d’indication précise et peut s’attendre à tout, on serait en présence alors d’un aboiement émotionnel.
Le cri d’alarme des chiots apparaît à la naissance et s’arrête à 2 mois. Par contre la mère n’y répond qu’à partir du moment où le dernier chiot est né. Et d’autre part elle n’y répond que jusqu’à 13 jours. Ensuite il semblerait qu’elle ne soit pas consciente du péril du chiot. Mais ceci varie selon les races et les individus. Les terriers ne répondent à ce cri de détresse seulement jusqu’à 9 jours. Après 2 mois ce cri se transforme et commence à se moduler pour devenir le cri d’alarme du jeune puis de l’adulte.
Pour R.Coppinger, les caractéristiques des races viennent exclusivement du déplacement des chiens de village grâce aux grandes transhumances. Certaines de ces grandes transhumances se faisaient sur des milliers de kilomètres. Les chiens de village se rencontraient, se reproduisaient etc. Les gènes se sont alors répartis au fil des rencontres, et au fil des traversées de pays. Puis suivant les caractéristiques des chiens, les être humains ont souhaités garder certains modèles moteur et les ont sélectionnés pour des activités spécifiques.
Mais pour R.Coppinger, il peut y avoir des variations entre les animaux en fonction de leur environnement, c’est à dire que la variation génétique interagit avec la variation des milieux de vie.
Ses recherches sur les chiens de protection de troupeau ont fait apparaître un taux de dopamine (molécule) relativement bas, par rapport aux chiens de conduite de troupeau. Plus la dopamine est élevée, plus le chien est excitable. Visiblement une alimentation pauvre en fer entraînerait une faible production de dopamine. Les bergers d’Anatolie en Turquie sont nourris pratiquement exclusivement avec des produits laitiers, pauvres en fer. Leurs analyses montrent un très faible taux de dopamine.
4. Intelligence et émotions
A) Dans la définition de l’intelligence, certains experts pensent qu’il y a 3 types d’intelligence:
a) la capacité conceptuelle (ou boite à outils mentale) ;
b) la théorie de l’esprit (ou le chien a-t-il un esprit ?) ;
c) la théorie de l’intentionnalité du système (Dennett 1983).
a) dans la capacité conceptuelle on a différents éléments.
*La connaissance de l’objet : par exemple, l’être humain fixe une bouteille, cette bouteille avance toute seule, l’être humain va se mettre en interrogation car il a connaissance de l’objet et des capacités de l’objet, une bouteille ne peut pas avancer toute seule.
Pour le chien, si on fait semblant de jeter une balle, il va partir dans le bon sens, il a donc une partie de la connaissance de la balle. Mais si la balle a un comportement inhabituel cela ne lui posera pas de problème.
*Image et permanence de l’objet :on installe 3 pots, on montre au chien la balle et on va cacher la balle dans un pot, puis on reprend la balle et on la met dans un deuxième pot puis on la ressort et la remet dans un troisième pot et on demande au chien d’aller cherche la balle. Il ira chercher la balle car il a l’image de la balle, il ne l’a trouvera pas directement car il n’a pas la permanence totale de l’objet, il ne peut pas se représenter l’image de la balle dans le bon pot. La représentation mentale de l’image se passe dans une partie du cerveau qui s’appelle le néocortex, or cet endroit du cerveau chez le chien ne fonctionne pratiquement pas.
Par contre si on lui montre le pot, il ira vers le pot, il est capable de faire un lien imaginaire sur la direction que nous lui indiquons jusqu’à la balle.
*La cardinalité, c’est à dire savoir compter : pour R.Coppinger, le chien n’a pas les outils mentaux pour compter, aucune étude sérieuse n’a pu, chez le chien, mettre cette capacité en avant.
*la capacité de faire une carte spatiale : du fait du nombre important de chiens qui se perdent tous les jours, R.Coppinger estime que le chien ne peut pas faire une représentation mentale dans l’espace. Aucune donnée sérieuse n’existe actuellement sur le sujet. Cela ne l’empêche pas de se retrouver par le flair mais il n’a pas de vue d’ensemble de son trajet.
*la notion et connaissance du temps : la définition du temps pour les philosophes et les physiciens, c’est se souvenir de l’avant et de l’après d’un événement. Pour R.Coppinger il doit y avoir un lien entre cette définition et la conscience, pour lui la conscience est la capacité à se souvenir de ce que l’on a fait. Ainsi le chien n’a pas de futur, il ne se projette pas dans l’avenir, il ne sait pas ce qu’il s’est passé la veille. Il ne peut donc pas avoir connaissance du temps. Sinon il aurait besoin de posséder la capacité de langage ni de capacité syntaxique.
b) La théorie de l’esprit: c’est la capacité à pouvoir faire des hypothèses sur ce que se représentent les autres, prédire leur comportement, leurs intentions, imaginer qu’ils ont telles ou telles préoccupations, croyances etc. On peut résumer en disant qu’avoir une théorie de l’esprit c’est pouvoir se représenter ce que se représentent les autres. Quand vous déprimez, est ce que le chien peut se représenter le fait que vous soyez triste, et le pourquoi de votre déprime? non.
Est-ce que le chien a une conscience de lui même ? Si on fait le test du miroir le chien ne se reconnaît pas, il n’a donc pas conscience de lui-même.
C) L’intentionnalité du système
Prenons un exemple : Spot le chien monte sur la terrasse et aboie.
*Est-ce que Spot monte sur la terrasse parce qu’il veut aboyer ?
*Est-ce que Spot monte sur la terrasse parce qu’il veut que ses propriétaires comprennent qu’il y a quelqu’un ?(notion de référence, il fait référence à ses propriétaires).
*est-ce que Spot monte sur la terrasse parce qu’il veut que ses propriétaires comprennent que lui-même (Spot) peut comprendre qu’il y avait quelqu’un ?
Mais est-ce que le chien sait ce qu’il est entrain de faire quand il aboie, ou est ce que l’aboiement n’est qu’un apprentissage involontaire ? R.Coppinger pense que le chien n’a pas d’intentionnalité.
En conclusion, R.Coppinger est d’avis que le chien n’est pas très intelligent voire pas du tout !! Cela ne lui enlève pas ses aptitudes et l’intérêt que lui porte l’homme.
B) Les émotions : le chien est-il capable d’émotions ?
Pour les éthologues, les émotions préparent tout l’organisme à l’action pour le plaisir et pour éviter les mauvaises choses. (Hanser 200). De ce fait, pour R.Coppinger la crainte par exemple n’est pas un modèle moteur mais c’est une émotion, un moyen d’équilibre pour trouver une solution, attaquer ou fuir, mais quelque soit la solution, elle fera plaisir à l’individu.
L’anxiété est une réponse chimique à une situation qui est génératrice de stress, et lors de la disparition de la réaction chimique on a alors l’apaisement.
Quand nous voyons deux chiens gueules ouvertes, crocs contre crocs, nous prenons cela toujours pour de la colère, mais cela n’est pas toujours le cas, quelquefois ils ne font rien de plus. Et s’ils prenaient plaisir à cette action ?
Pour les béhavioristes, un stimulus environnemental entraîne un modèle moteur approprié qui entraîne un résultat fonctionnel. Par ex : « Souris Þ saut Þ manger la souris. ». Il n’y a pas d’émotion à l’origine d’un comportement.
Mais on s’est aperçu que certains animaux faisaient des actions sans résultat fonctionnel, gratuitement, c’est à dire sans récompense, visiblement pour le plaisir.
Pour l’écologie comportementale, la motivation interne (crainte, anxiété, excitation, cherche etc.) entraîne le modèle moteur approprié qui entraîne la récompense interne qui est le plaisir.
Par exemple : le chien prend une posture dite de dominant, il prend du plaisir à adopter cette posture. Celui qui se soumet a de l’anxiété, il met en place son modèle moteur dit de soumission, qui fait diminuer son anxiété, ce qui lui apporte du plaisir.
Autre exemple si l’on prend le modèle moteur du Border collie :
« Je fixe, je me mets à l’affût, je chasse, je mords, etc. ». « je fixe » me procure un certain plaisir. Quand le seuil du plaisir est atteint, « je passe à l’affût », ce qui me procure encore du plaisir, puis, le seuil du plaisir atteint, « je passe à la chasse » etc.
En conclusion, le chien pour les éthologues est capable d’émotions.
Je serai absent environ 8 jours du 14 au 22 mars, et la semaine du 5 au 9 avril en raison de mon parcours professionnel d’éthologie appliquée avec l’université de Rennes.
Il est conseillé de prendre vos rendez-vous à l’avance, directement en ligne pour le suivi continue de vos chiens.
François